La jouissance, dans le domaine de l’immobilier, désigne le droit de disposer librement du bien, en l’occupant soi-même ou en le louant. Elle bénéficie par défaut au propriétaire, sauf si ce dernier a fait le choix de donner la jouissance du bien à un usufruitier dans le cadre d’un démembrement.
Qu’est-ce que la jouissance d’un bien immobilier ?
Elle est définie indirectement par l’article 544 du Code civil, qui la rattache au droit de propriété. Ce dernier, pour rappel, consiste à « disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ». Le droit de propriété d’un bien immobilier a trois composantes :
- l’usus, qui est le droit d’utiliser et d’habiter le bien ;
- le fructus, qui est le droit d’exploiter le bien (le louer) ;
- l’abusus, qui est le droit de disposer du bien (le vendre).
La jouissance d’un bien immobilier consiste à disposer à la fois de l’usus et du fructus. Il s’agit donc de la capacité à habiter le bien et à le mettre en location.
En règle générale, c’est le propriétaire qui détient le droit de jouissance sur son bien. Il est toutefois possible de réaliser un « démembrement de propriété » afin de distinguer :
- un nu-propriétaire, qui possède les murs du bien immobilier sans être en droit de l’habiter ou de l’exploiter ;
- un usufruitier, qui n’est donc pas le propriétaire du bien mais peut l’habiter et le mettre en location.
Un démembrement peut survenir dans le cadre d’une donation familiale, afin de limiter les droits de succession et de permettre au donateur de rester dans son logement. Elle peut aussi intervenir, par exemple, dans le cadre d’une vente en viager occupé : dans ce cas, le vendeur conserve la jouissance du bien jusqu’à son décès.
À quoi sert une jouissance différée en cas de vente ?
La signature de l’acte authentique de vente chez le notaire n’entraîne pas toujours la remise immédiate des clés à l’acquéreur. Il peut arriver que le vendeur souhaite rester quelques semaines ou mois supplémentaires dans le logement, par exemple pour attendre la libération de son futur logement ou la réalisation de travaux.
Dans ce contexte, une convention de jouissance différée ou « convention de prêt » peut être conclue. Cette convention a la valeur d’un simple contrat négocié entre les deux parties et n’est normalement pas signée devant notaire. Elle mentionne :
- la date de libération effective et définitive du bien ;
- le montant de l’indemnité d’occupation versée par le vendeur, qui n’est désormais plus le propriétaire du bien ;
- une astreinte journalière pour tout jour de retard si le vendeur ne libère pas les lieux à la date prévue.
Une convention de jouissance différée est peu sécurisante pour l’acquéreur du bien. Il est donc conseillé de rajouter une clause relative au séquestre de tout ou partie du prix de vente jusqu’à la libération effective du logement. Mentionnez également l’interdiction de réaliser une transformation du bien durant l’occupation.
Lorsque l’acquéreur souhaite occuper les lieux avant la signature de l’acte de vente, il est également possible de signer une convention d’occupation anticipée.
Comment donner un bien immobilier et en conserver la jouissance ?
Une donation en démembrement permet à une personne âgée d’anticiper sa succession, en confiant la nue-propriété du bien immobilier à son ou ses héritiers et en conservant l’usufruit. L’opération est intéressante dans la mesure où la donation bénéficie d’un abattement sur la valeur de la nue-propriété, qui augmente avec l’âge du donateur. Il s’établit, par exemple, à :
- 70 % à partir de 71 ans ;
- 80 % à partir de 80 ans ;
- 90 % à partir de 91 ans.
Le transfert de l’usufruit au nu-propriétaire après le décès n’occasionne ensuite le paiement d’aucun droit de mutation.
Pour démembrer une propriété, il est obligatoire de réaliser un acte notarié.
La jouissance d’un bien immobilier est une notion importante dans le cadre d’une propriété individuelle, mais aussi celui d’une copropriété. Ainsi une partie commune à usage exclusif d’un copropriétaire ne donne pas le droit de s’y comporter en propriétaire exclusif. Ce principe a été récemment rappelé par la Cour de cassation.